11 Janvier 2017
La rhétorique a longtemps étudié les figures qualifiant les usages de la langue qui s’écartent de l’usage commun. La publicité tire en grande partie sa force de la transgression que permettent ces figures.
Substitution opérée par la métaphore : « Ils viennent les chevaux de la Mer ! » Jean Tardieu (La Grande marée de printemps, recueil Margeries, 2009). Huile sur toile, (1893) par Walter Crane.
Une figure de style est un procédé d'expressions qui vise à produire un effet, une impression : émouvoir, séduire, convaincre, attirer l'attention...
Une figure de style, du latin figura, est un procédé d’expression qui s’écarte de l’usage ordinaire de la langue et donne une expressivité particulière au propos. On parle également de figure de rhétorique ou de figure du discours. Si certains auteurs établissent des distinctions dans la portée des deux expressions, l’usage courant en fait des synonymes.
Analogie : (Rhétorique) Un raisonnement par analogie (ou « raisonnement analogique ») conclut d’une ressemblance connue entre deux choses à une ressemblance encore inconnue. Il s’agit de tirer des conclusions nouvelles en s’appuyant sur des ressemblances entre deux choses.
Substitution : Élimination d'un mot par un autre au cours de l'évolution d'une langue.
Principe de base | Nom | Définition | Exemple |
Analogie | l'image | fondée sur l'équivalence, l'image consiste en un rapprochement de deux champs lexicaux qui met en évidence un élément qui leur est commun | « Les souvenirs sont cors de chasse |
la comparaison | la comparaison comporte trois éléments : le comparé - l'outil de comparaison - le comparant (éventuellement inversés) | « La musique souvent me prend comme une mer » | |
la métaphore | image sans outil de comparaison – on distingue la métaphore annoncée (ex.1) où le comparé et le comparant sont présents et la métaphore directe (ex.2) dans laquelle le comparé est sous-entendu, d'où une grande force de suggestion mais aussi un risque d'incompréhension qui rend nécessaire le contexte |
« Ce toit tranquille, où marchent des colombes, — Paul Valéry, Charmes, Le Cimetière marin le contexte permet de comprendre que « toit » renvoie à « mer » et « colombes » à « voiles de bateaux ». | |
Substitution | la personnification ou l'animation | évocation d'une chose ou d'une idée sous les traits d'un être humain, ou d'un animal | « Je vis les arbres s'éloigner en agitant leurs bras désespérés » — Marcel Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleurs, Deuxième partie « [...] la grande République |
représentation concrète d'un élément abstrait | « Mon beau navire, ô ma mémoire » | ||
le symbole | image référence | « Le poète est semblable au prince des nuées | |
l'image filée (ou métaphore filée) | s'étend sur plusieurs éléments | « [...] et Ruth se demandait, | |
épithète impertinente constituant une métaphore par le décalage de la relation logique entre les éléments d'une phrase | « le mélancolique animal » — Jean de La Fontaine, Le Lièvre et les Grenouilles « Automne malade » — Guillaume Apollinaire, Alcools, Automne malade « Qu'au son des guitares nomades — Louis Aragon, Le Roman inachevé, À chaque gare de poussière... | ||
le cliché | image considérée comme usée |
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la métonymie | elle remplace un terme par un autre qui a un rapport logique. Elle peut substituer le contenant au contenu (ex), le symbole à la chose (les lauriers = la gloire), l'objet à l'utilisateur (le premier violon), l'auteur à son œuvre (un Zola), l'effet à la cause (Socrate a bu la mort = la ciguë)… | « C'était au temps où Bruxelles chantait » — Jacques Brel, Bruxelles | |
la synecdoque | c'est une variété de métonymie, parfois confondue avec elle ; elle est fondée sur le principe de l'inclusion. Elle permet d'exprimer la partie pour le tout (ex.1) ou la matière pour l'objet (ex.2) |
« Mon bras qu’avec respect toute l’Espagne admire, — Corneille, Le Cid, acte I, scène 4
« Ah ! quelle cruauté, qui tout en un jour tue | |
nom propre employé comme nom commun | « C'est l'ennui de me voir trois ans et davantage, — Du Bellay, Les Regrets, Ce n'est que le fleuve… | ||
atténuation pour éviter de heurter ; procédé utilisé par exemple comme marque poétique et qui passe souvent par une périphrase avec également une fonction métaphorique | « La Parque t'a tuée, et cendres tu reposes » — Ronsard, Sur la mort de Marie, V - Comme on voit sur la branche au mois de May la rose | ||
la litote | atténuation qui suggère le plus en disant le moins, souvent à l'aide d'une tournure négative (ex.1). Également procédé d'ironie (ex.2) |
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la périphrase | remplacement du mot par une expression explicative, fonction poétique et métaphorique ou atténuation | « Les Filles du limon tiraient du Roi des Astres | |
expression d'une idée par son contraire avec une ironie clairement perceptible d'où nécessité du contexte ou de l'intonation | « Tout ce joli monde se retrouvera là-haut — Jacques Prévert, Paroles, Le Temps des noyaux |
Instistance : Souligner quelque chose avec force, mettre l'accent dessus, s'y arrêter, en prendre un soin particulier
Opposition : Rapport distinctif existant entre des unités de même niveau (phonème, morphème) pouvant être substituées l'une à l'autre en un point donné de l'énoncé. (Ainsi, la différence de voisement entre | p | et | b | permet de distinguer pas et bas, ce qui constitue une opposition phonologique.)
Principe de base | Nom | Définition | Exemple |
Insistance | reprise à la fin d'une proposition du même mot que celui situé en début (ex. 1), par opposition à l'anadiplose qui est une reprise juxtaposée (ex. 2) |
« Comme le champ semé en verdure foisonne, | |
reprise d'un groupe de mots au début d'une proposition (construction emphatique) | « Songe, songe, Céphise, à cette nuit cruelle... » — Jean Racine, , Andromaque, acte III, scène 8 | ||
l'anaphore | reprise de mots dans des constructions semblables avec un effet de rythme sensible | « Puisque le juste est dans l'abîme, — Victor Hugo, Les Châtiments, Livre deuxième, V : Puisque le juste est dans l'abîme | |
l'épiphore | reprise d'un mot ou de plusieurs mots dans deux ou plusieurs phrases ou vers qui se succèdent | « Longue comme des fils sans fin, la longue pluie — Émile Verhaeren, Les Villages illusoires, La pluie | |
juxtaposition (ex. 1), avec éventuellement un effet de gradation croissante ou décroissante, et d'acmé (point culminant, ex. 2) ou climax |
« adieu veau, vache, cochon… » — La Fontaine, La Laitière et le Pot au lait
« Va, cours, vole, et nous venge. » | ||
le parallélisme | structure en miroir montrant l'identité ou l'opposition (proche de l'antithèse) | « Mon cheval sera la joie — Victor Hugo, La Légende des siècles, Les Chevaliers errants, Éviradnus, XI : Un peu de musique | |
amplification traduisant l'émotion ou apportant un souffle épique (ex. 1), éventuellement avec un effet ironique ou plaisant (ex. 2) |
« Semble élargir jusqu'aux étoiles — Victor Hugo, Les Chansons des rues et des bois, Saison des semailles. Le soir « Ô République universelle, — Victor Hugo, Les Châtiments, Lux
« Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois » | ||
Opposition | le chiasme | parallélisme et inversion, souligne l'union ou l'opposition | « Parler en mangeant, manger en parlant » — Balzac « Tu m'emmènes, je t'enlève... » — Victor Hugo, La Légende des siècles, Les Chevaliers errants, Éviradnus, XI : Un peu de musique |
parallélisme et opposition | « Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ; » | ||
l'oxymore | variété d'antithèse à l'intérieur d'un groupe nominal, d'une expression | « Éphémère immortel » — Paul Valéry, Charmes - Fragments du Narcisse vers 123 « Le superflu, chose très nécessaire » | |
le zeugme (ou zeugma) | Ellipse d'un mot ou d'un groupe de mots qui devraient être normalement répétés, ce qui a pour conséquence de mettre sur le même plan syntaxique deux éléments appartenant à des registres sémantiques différents | « Un pauvre bûcheron, tout couvert de ramée, |
Principe de base | Nom | Définition | Exemple |
Reprise de sons | répétition dans plusieurs mots d'une sonorité consonantique avec un effet de rythme marqué, pouvant créer une harmonie imitative | répétition expressive des /r/ : « Tandis que les crachats rouges de la mitraille — Arthur Rimbaud, Poésies, Le Mal répétition expressive des /v/ : « Voilà ! Vois en moi l'image d'un humble vétéran de vaudeville, distribué vicieusement dans les rôles de victime et de vilain par les vicissitudes de la vie. Ce visage, plus qu'un vil vernis de vanité, est un vestige de la vox populi aujourd'hui vacante, évanouie. Cependant, cette vaillante visite d'une vexation passée se retrouve vivifiée et a fait vœu de vaincre cette vénale et virulente vermine vantant le vice et versant dans la vicieusement violente et vorace violation de la volition. Un seul verdict : la vengeance. Une vendetta telle une offrande votive mais pas en vain car sa valeur et sa véracité viendront un jour faire valoir le vigilant et le vertueux. [Il rit] En vérité, ce velouté de verbiage vire vraiment au verbeux alors laisse-moi simplement ajouter que c'est un véritable honneur que de te rencontrer. Appelle-moi V. » | |
[stylistique] répétition d'une voyelle dans plusieurs mots d'une même phrase (ex. 1) ; [poétique] rimes qui s’accouplent sur un groupe vocalique formé d’une voyelle tonique identique et d'un phonème consonantique variable (opposé : contre-assonance) | reprise du son /an/ : « Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant » — Paul Verlaine, Poèmes saturniens, Melancholia — VI : Mon rêve familier | ||
répétition d'un son ou d'un groupe de sons à la finale de plusieurs mots successifs | « cette tour était la flèche la plus hardie, | ||
Proximité des sons | la paronomase | jeu sur la proximité des sons (paronymie) | « Et l’on peut me réduire à vivre sans bonheur, — Corneille, Le Cid, acte II scène 2 « Comme la vie est lente |
Principe de base | Nom | Définition | Exemple |
Rupture de construction | juxtaposition sans lien grammatical (parataxe) qui marque de l'émotion ou la spontanéité (ex.1), ou constitue un raccourci frappant (ex.2) |
« Ça a débuté comme ça. Moi, j'avais jamais rien dit. Rien. C'est Arthur Ganate qui m'a fait parler. Arthur, un étudiant, un carabin lui aussi, un camarade. » — Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit, incipit
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non-respect de la syntaxe courante, par exemple non rattachement de l'adjectif au nom | « Exilé sur le sol au milieu des huées |
Principe de base | Nom | Définition | Exemple |
Discours recréé | la prosopopée | donner la parole à un absent | « Écoutez. Je suis Jean. J'ai vu des choses sombres » — Victor Hugo, Les Contemplations, Livre VI, IV : « Écoutez. Je suis Jean. J’ai vu des choses sombres » Hugo fait parler saint Jean, bouche d'ombre de l'Apocalypse |
Silence non tenu | la prétérition | parler de quelque chose après avoir annoncé que l'on ne va pas en parler | « Je n'essaierai donc pas de vous décrire quel sombre enthousiasme se manifesta dans l'armée insurgée après l'allocution de Biassou. Ce fut un concert distordant de cris, de plaintes, de hurlements. Les uns se frappaient la poitrine, les autres heurtaient leurs massues et leurs sabres… » |
Interpellation feinte | fausse question destinée à garder ou à susciter l'intérêt du lecteur interpellé | « Fit-il pas mieux que de se plaindre ? » |
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